C’est le style de récits dont on entend souvent parler. Celles de femmes, survivantes, qui entre les sentiers d’Uvira et les collines de Bukavu, transportent des marchandises, de l’espoir et parfois des enfants adossés à leurs fardeaux. Jusqu’au jour où leurs corps et leur être se transforment en zone de guerre, forcée par des hommes armés, puis réduites au silence. Très souvent, elles ne figurent dans aucun rapport officiel. Jusqu’au 16 avril 2025, où leurs sorts et le poids de leur existence, sont évoqués au sein d’un bâtiment de la MONUSCO, à Kinshasa. Et ce jour-là, d’autres femmes ont décidé qu’elles ne seraient plus jamais invisibles.
Des dames comme Edith Meta Mwa Mbuyi, présidente de la Fondation Elaeïs ; Tabitha-Tiffany Moseka, Agée Chuga et tant d’autres, venues du Nord-Kivu, de l’Ituri, de Kinshasa et de nombreuses autres provinces. Elles ne sont politiciennes. Leaders communautaires, mais surtout, des témoins, réunies pour une tâche : faire un plaidoyer pour ramener la paix à l’Est de la RDC. Dans une note portée par la Bintou Keita, Cheffe de la MONUSCO et réunissant diverses recommandations concrètes, elles se dressent au-delà de la symbolique, face aux balles, aux viols, aux pillages. Elles opposent des mots, des faits, des statistiques, et la mémoire des victimes.
« Humaniser le plaidoyer », disait Alain Likota, formateur et déplacé lui-même de Bukavu. Le plaidoyer, ce n’est pas une démarche froide. À l’exemple d’Akogwa. Une femme, agricultrice, enlevée à plusieurs reprises, spoliée de ses terres, bafouée dans sa dignité pour avoir dénoncé l’injustice des baïonnettes dans le Kivu.
Ce jour-là, la MONUSCO, le PNUD, ONU Femmes et la société civile ont jeté les bases d’un agenda pour la paix. Pas une paix abstraite. Une paix avec des priorités : urgentes, à moyen terme, à long terme. Une paix qui demande aux groupes armés, au Rwanda, aux institutions régionales et à la communauté internationale à ce que cesse l’utilisation des femmes comme champ de bataille. Une paix qui exige des ressources, de la justice, et surtout, de la reconnaissance.
Car oui, les femmes ne sont pas que victimes. Elles sont médiatrices, agricultrices, soignantes, artisanes de résilience. Elles protègent, elles alertent, elles reconstruisent. Et aujourd’hui, elles écrivent une page de l’histoire que le monde ne peut plus ignorer.
Dans un pays où plus de 6,9 millions de personnes sont déplacées et où les minerais continuent d’alimenter les conflits, ces femmes rappellent une vérité simple : la paix durable ne se fera pas sans elles.
Et Akogwa ? Elle ne sera plus qu’un chiffre. Elle est le souffle d’un plaidoyer. Une voix que les femmes du Congo refusent d’éteindre. Un plaidoyer pour construire la paix et garantir la sécurité pour des millions de femmes congolaises.